Une utopie constructive
par Jeanne Dagbert
Sculptures-structures en bois, entre constructivisme et architecture gothique. Des morceaux de bois, entrelacés de manière chaotique ou organisés de manière rigoureuse et répétée, forment de fragiles et improbables architectures.
Parti du minimalisme dans les années soixante-dix (Joe Neill résidera aux États-Unis jusqu’au début des années quatre-vingt-dix, puis s’installera à Paris), avec la fabrication d’objets pseudo-fonctionnels (tables, échelles), et s’orientant ensuite vers des installations au sol de structures cartographiques, autoroutes idéales menant à une improbable cité idéale (Rood Pieces, 1976-1 979), Neill poursuit son rêve d’un urbanisme utopique dans les constructions pour ainsi dire baroques de ses deux grandes tours, Urban Dreams, réalisées tout récemment. Si le somptueux Time Space Paysage (1993) manifestait un constructivisme triomphant, animé par un mouvement en expansion vers l’extérieur, les dernières œuvres se caractérisent par des entrelacs fouillés de petits morceaux de bois, collés les uns aux autres par la gomme laque, formant un grand nombre de courbes et d’ellipses qui donnent une impression de gracilité, voire de fragilité, comme dans Turbulences Above (1997).
La démarche visionnaire de Joe Neill est tout à fait manifeste dans ses dessins. Exécutés au crayon de couleur ou à l’encre de Chine, parfois à partir d’une technique numérique, mais la plupart du temps à partir d’une projection axonométrique et perspectiviste, ils sont toujours le résultat d’un jeu de l’esprit, construisant des modèles de la structure de l’univers ou de la planète terre, projetés en suspension dans l’espace. Vaisseau spatial imaginaire dans Blue Sky pour une boule d’or, chemins curvilignes tracés à l’encre dans la série Night And Day (1994), blocs d’expansion énergétique dans Dream Space (2000), les formes diverses et très imaginative s’organisent autour d’une sphère minuscule plus colorée qui figurerait la terre vue de l’espace.
Jeanne Dagbert
Catalogue « Joe Neill : sculptures-dessins, 12 janvier-16 février 2002 » , Gennevilliers : Galerie municipale Edouard Manet ; Paris : Galerie Lelia Mordoch, 2002, non paginé.